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Double espresso et galette des rois : ITW avec le Chef pñtissier Jonathan Blot 🍰☕

PĂątissier crĂ©atif, technique et doué s’il en est, Jonathan Blot est connu (et reconnu !) pour ses macarons aux saveurs originales, qu’il proposait dans ses salons de thĂ© Acide dans le 7Ăšme et le 17Ăšme arrondissement de Paris. Le Chef pĂątissier s’est fait remarquer pour ses classiques revisitĂ©s (le cheesecake !) et ses sorbets contemporains. Élu pĂątissier de l’annĂ©e du guide Pudlo 2015, il est dĂ©sormais installé dans le Var et continue de rĂ©galer, d’imaginer et de crĂ©er la surprise. Un grand fan de cafĂ©, Jonathan raconte sa relation au cafĂ© de spĂ©cialitĂ©, et en quoi cette passion personnelle infuse son travail de crĂ©ation.

Quelle a été ta rencontre avec le café de spécialité ?

Ma premiĂšre approche du cafĂ© de spĂ©cialitĂ© remonte au moment de l'ouverture de mes premiĂšres boutiques Ă  Paris. En 2008, j’ai ouvert une petite boutique qui faisait uniquement des macarons. Nous n’avions pas de machine Ă  cafĂ© par manque de place. En 2012, on a ouvert un salon de thĂ© Ă  Batignolles (Acide) pour lequel on s'est Ă©quipĂ©s d'une La Marzocco et de deux moulins grĂące Ă  Lomi. Le premier servait pour un blend un peu passe-partout et le second, un moulin plus petit, servait Ă  faire dĂ©couvrir des cafĂ©s d'exception. La rĂšgle Ă©tait toujours d'en proposer un nouveau. C'est vite devenu partie intĂ©grante de notre quotidien. Je suis moi-mĂȘme un gros consommateur de cafĂ©. Je prĂ©fĂšre les cafĂ©s trĂšs typĂ©s, d'Ethiopie, du Rwanda, d'altitude, un peu concentrĂ©s, plutĂŽt traitĂ©s par voie sĂšche et avec des notes aromatiques de fruits trĂšs mĂ»rs. Plus ça sent fort, plus ça me plaĂźt !

Jonathan Blot est un inconditionnel du double espresso. Torréfié par Lomi SVP et bien extrait !

Quelle est ta routine café à la maison ?

J’adore me faire un espresso trĂšs court, en double dose, avec du cafĂ© fraĂźchement moulu. J'ai d'abord eu une Moccamaster avec laquelle je faisais du filtre. A la maison, j'ai aussi des cafetiĂšres italiennes, des french press, tout un tas d’équipement. Le filtre m'allait bien, c'est lĂ©ger. Ensuite, j'en ai eu un peu marre du filtre et j'ai dĂ©cidĂ© d'acheter une machine Ă  espresso Sage sur le site de lomi. J'ai retrouvĂ© le type d'extraction qui me plaisait, et avec votre cafĂ© d'Ethiopie je me rĂ©gale !

J'encourage vraiment mes amis Ă  avoir une machine Ă  espresso chez eux ou au moins un bon moulin Ă  cafĂ©, plutĂŽt que de boire du cafĂ© en capsules. C'est trĂšs bien pour les rĂ©veils difficiles, quand le cerveau n'est pas encore enclenchĂ©, mais c'est vraiment diffĂ©rent de commencer la journĂ©e avec un bon produit ! Je m'interdis d'avoir la mĂȘme machine Ă  espresso prĂšs de moi au travail parce que j'en Ă©tais arrivĂ© Ă  50 espressos par jour, c'Ă©tait devenu n'importe quoi.

Qu'est-ce qui te plaĂźt particuliĂšrement dans l'espresso ?

L'intensitĂ©. J'aime bien quand c'est trĂšs court. Je mets une double dose de mouture mais pas plus d’eau, pour avoir un rĂ©sultat assez concentrĂ©. J'aime bien quand c'est bien marbrĂ©, bien Ă©pais.

Quels arĂŽmes recherches-tu particuliĂšrement ?

Je cherche plutÎt les acidités. Ce qui me plaßt le plus, c'est toute la palette aromatique que tu peux retrouver dans les grands cafés.

C'est pour ça que j'aime beaucoup le mono origine : on peut retrouver toutes ces notes de belle acidité noble et toutes ces nuances dans l'extraction. Je retrouve tout ça avec cette machine !

Quand tu fais goûter du café autour de toi, est-ce que tu sens que c'est une découverte surprenante pour les gens ?

Je m'aperçois avec le temps qu'il faut amener le cafĂ© de spĂ©cialitĂ© avec une petite histoire. Quand tu prĂ©pares l'esprit de la personne qui va goĂ»ter, et qu'ensuite c'est bien extrait, ça plaĂźt. C'est gourmand. Si tu le prĂ©sentes rapidement Ă  quelqu'un qui n'a jamais goĂ»tĂ© de cafĂ© de spĂ©cialitĂ©, les gens sont surpris par l'intensitĂ© et parfois par l'aciditĂ©. Le monde du cafĂ© a trĂšs longtemps Ă©tĂ© uniformisĂ© avec un goĂ»t qui devait plaire Ă  tout le monde : brĂ»lĂ©, sur-extrait, rance. C’est parfois difficile de trouver un bon cafĂ© dans une ville, mais ça avance.

Pas un narcotrafficant mais un dealer de gourmandises !

Dans ton univers professionnel, le café est-il un produit vers lequel tu te tournes dans tes créations pùtissiÚres ? Et si non, qu'est-ce qui ferait que tu l'intégrerais un peu plus ?

J'ai appris comme tous les pĂątissiers Ă  travailler avec des extraits de cafĂ© tout faits, imbuvables. Le monde de la pĂątisserie a Ă©tĂ© formatĂ© comme ça. Je pense qu'on a du mal Ă  vendre le cafĂ© en pĂątisserie car une mauvaise rĂ©putation entoure la transformation du cafĂ©, comme la banane ou la cannelle. Les mauvaises cannelles et les mauvais cafĂ©s ont pris le dessus dans la tĂȘte et le palais des gens, et la plupart ne veulent pas s'aventurer lĂ -dedans. Si tu veux essayer, il faut tout de suite comprendre que le cafĂ© est une infusion. Il ne faut pas essayer de le travailler diffĂ©remment. Comme toutes les infusions, il y a des choses Ă  respecter. C'est Paul (Arnephy) qui m'a expliquĂ© tout ça : il faut moudre instantanĂ©ment et adĂ©quatement, infuser directement, et se chronomĂ©trer. En pĂątisserie, on travaille beaucoup Ă  base de produits laitiers et de matiĂšres grasses. Je me suis dissociĂ© de ça maintenant, et je prĂ©fĂšre une infusion Ă  l'eau que je fais trĂšs concentrĂ©e et que j’utilise pour parfumer autre chose. Je me suis rendu compte qu'avec la crĂšme, on est assez bridĂ©s vis-Ă -vis du cafĂ©. Le taux d’extraction est bien meilleur dans l’eau, on parvient Ă  sortir beaucoup plus d'arĂŽmes qu'avec la crĂšme.

Est-ce que tes expĂ©rimentations t’ont permis d’aboutir Ă  une recette idĂ©ale d’extrait de cafĂ© ?

J'utilise une rÚgle que j'avais mise au point en travaillant avec Paul. Il m'avait montré un type de mouture assez grosse, que je jetais dans un liquide à 90°C (à l'époque, c'était une crÚme), en grande quantité, et que je laissais infuser durant 6 minutes. Ensuite, je filtre. Je trouve que tu ne peux pas faire mieux, pour moi c'est le top de l'infusion.

Quand je ne parfume pas directement une masse, je me fais moi-mĂȘme mon extrait de cafĂ© avec cette grosse mouture, un peu d'eau Ă  90°C et ensuite, si j'ai besoin de quelque chose de plus Ă©pais, je fais rĂ©duire tout doucement jusqu'Ă  arriver Ă  une texture sirupeuse.

Avec cette technique, parviens-tu à retrouver toute la palette aromatique du café que tu choisis ?

Exactement, c'est le but. Et c'est sĂ»rement le plus dur dans le cafĂ©, et encore plus dans la pĂątisserie : on choisit un cafĂ© d'origine pour ses particularitĂ©s, mais pour retrouver ses particularitĂ©s en tasse ou dans le gĂąteau, c'est hyper compliquĂ©. Certains pĂątissiers n'y parviennent pas et finissent par dire ne plus se soucier du cafĂ© qu’ils choisissent, car de toute façon ils ne retrouveront pas ses subtilitĂ©s Ă  la fin. Il y a pire encore : ceux qui torrĂ©fient le cafĂ© dans leur four une seconde fois et le jettent dans leur crĂšme, alors qu’on sait trĂšs bien que re-torrĂ©fier un cafĂ© est trĂšs mauvais. Ils veulent un goĂ»t amer et puissant et donc ne cherchent pas forcĂ©ment un cafĂ© d'origine avec une palette aromatique originale. C'est de lĂ  que vient la mauvaise rĂ©putation du cafĂ© dans la pĂątisserie.

Quelle est ton actualité en matiÚre de création pùtissiÚre ?

En ce moment, on travaille sur les galettes, naturellement. On a créé des galettes parfumées, par exemple une galette au cacao, une vraie merveille. On avait un peu peur, c'est un peu difficile de rajouter une ganache au chocolat dans un produit déjà riche. On en a fait une deuxiÚme aux pralines roses, une autre aux pommes et caramel beurre salé. Super gourmand ! 

La galette au sirop d'Ă©rable de Jonathan Blot

Quel café recommandes-tu pour accompagner une galette des rois ?

J’ai arrĂȘtĂ© d’accompagner mes galettes de cidres ou de poirĂ©s, parce que c’est difficile de trouver un bon produit et on l’a dĂ©jĂ  beaucoup vu. Je prĂ©fĂšre un bon cafĂ© filtre, d'origine, bien juteux, avec un goĂ»t de cerise, ou mĂȘme une infusion de cascara. Toutes ces notes de fruits rouges et de cerises bien mĂ»res vont hyper bien avec l'amande torrĂ©fiĂ©e. Je trouve l'espresso trop puissant pour le goĂ»t subtil de l'amande grillĂ©e. 

Jonathan, selon toi le café parfait existe-t-il ?

Evidemment, cela dĂ©pend des goĂ»ts de chacun... Moi j'aime des cafĂ©s que personne n'aime chez moi. Plus c'est particulier, plus ça me plaĂźt ! Je garde d’excellents souvenirs des cafĂ©s d'HawaĂŻ, un peu iodĂ©s. Ah, ça me fait un petit frisson dans le dos !

Découvrez nos conseils pour extraire l'assemblage signature de Lomi "J'ai deux Amours", et poursuivez votre lecture avec l'approche de Paul Arnephy (MOF Torréfacteur)

Crédits photos : comptes instagram et facebook de Jonathan Blot

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